Photo de Andrea Piacquadio sur Pexels.com

OPINION. Ne saurions-nous offrir une bonne qualité de vie à nos anciens, une vie où ils se sentiraient dignes et respectés jusqu’au dernier souffle ? Le gouvernement doit arrêter les petits plans pour pallier le manque du budget de l’État et soutenir des vrais fonds citoyens de solidarité.

Le premier ministre annonce le 23 septembre 2021 « plus de 400 millions d’euros » de nouveaux financements dans le cadre du budget de la sécurité sociale pour 2022. Avec un objectif de recruter 10 000 emplois sur 5 ans. Ce coup de pouce, qui peut « monter progressivement en charge, pour atteindre environ 1,3 milliard d’euros en 2025« , signe la mort de la loi « grand âge et autonomie ». Pourtant cette urgence est due à un demi-siècle de politiques inabouties à cause du coût de financement difficile à intégrer au budget de l’État. Avec un tiers de la population âgé de plus de 60 ans en 2060 selon l’Insee, « la dépense publique en faveur des personnes dépendantes augmenterait très fortement d’ici à 2060 pour atteindre 2,07 points de PIB, et la dépense totale doublerait presque à 2,78 points de PIB » (Drees). Malgré toutes les réformes telles que la création des agences régionales de santé (ARS) en 2010 ou la loi du 28 décembre 2015 sur l’Adaptation de la société au vieillissement, la France reste toujours en procrastination. Les gouvernements et la société civile doivent, pour des raisons démographiques, se donner la main pour investir immédiatement 400 Md€ sur 10 ans pour être prêts avant 2030.

Travailler plus longtemps pour que le fruit de ce travail finance la prise en charge de la perte d’autonomie. C’est l’une des pistes envisagées par le gouvernement pour alléger la facture des personnes dépendantes. Âge de départ à la retraite, hausse de la durée de cotisation, nouvelles journées de solidarité… plusieurs options sont sur la table de l’exécutif pour financer la prise en charge du grand âge et de la perte d’autonomie. Aucune ne peut compenser le retard de la France : « les dépenses publiques qui regroupent les dépenses de la perte d’autonomie des personnes âgées sont de 1,7 % du PIB en France. Par rapport aux Pays‑Bas (3,7 %), à la Suède (3,2 %) et au Danemark (2,5 %) ».

Pour le handicap, le budget est loin du compte. La nouvelle branche autonomie, gérée par la CNSA, va consacrer, pour 2021, uniquement 31,6 Md€ à l’autonomie des personnes âgées ou handicapées. En Belgique 6 500 adultes et 1 500 enfants handicapés français sont hébergés dans des établissements spécialisés. Les annonces du Président le 11 février 2020, pour le recrutement de 11 500 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et la création de 1 000 places supplémentairesvont dans le bon sens mais restent largement insuffisantes. Les congés aidants ne sont pas là pour pallier le manque du budget de l’État.

Grand âge, autonomie et budget : Il faut investir la somme de 400 Md€ sur 10 ans en partenariat avec l’État, les institutions associatives, les communes et les établissements de formation, pour :

  • le financement de la dépendance par la création d’habitats à but non lucratif partagés, sécurisés avec accompagnement. C’est un type d’habitat entre les résidences et les EHPAD intégrant des micro-crèches et des services de soins infirmiers ;
  • le financement de la dépendance par la création des maisons de répit médicalisées à but non lucratif ;
  • le financement des EHPAD spécialisés à but non lucratif ;
  • le financement du handicap et la création d’établissements spécialisés à but non lucratif et embauches d’accompagnants (35 000 selon le collectif citoyen handicap) ;
  • la création de 300 000 emplois d’ici 2030 : aides-soignants, auxiliaires de vie, infirmiers, assistants de soins en gérontologie, kinés, etc. ;
  • la création d’1 million d’aidants professionnels sur 10 ans : « aujourd’hui 8,3 millions de personnes de 16 ans ou plus occupent la fonction de proche aidant : 4,3 millions auprès de personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile (dont 3,4 millions pour des actes de la vie quotidienne) et 4 millions auprès de personnes âgées de moins de 60 ans« .

D’où vient l’argent ? Bien rémunéré au taux de l’inflation, le financement peut venir des retours des placements des Français à l’étranger et en Europe plus rentables aujourd’hui que nos livrets A, LDDS, LEP ou des placements à risques proposés par les banques privées. Il peut également venir des 282,50 Md€ du PEL (chiffre fin 2019) qui n’est plus attractif : rigidité à court terme, pas de rentabilité à long terme, collecte en baisse, taux crédit marché plus compétitif pour les prêts immobiliers, bloqué 4 ans. Enfin, il y a le surplus des épargnes des ménages accumulé pendant la pandémie.

Pourquoi ça ne coûte rien et ça peut rapporter gros ? Les ménages peuvent facilement prêter à l’État 40 Md€ par an dans un cadre d’une épargne réglementée (taux de rémunération égale au taux de l’inflation). Dans cette approche, il n’y a ni emprunt via les banques commerciales ni création monétaire ni augmentation de la dette publique. En se référant à l’étude de l’OFCE, au vu de la crise actuelle et des taux d’intérêt, les investissements auront un effet de création de richesse estimée à un multiplicateur de 2 avec 60 centimes rendus à l’État pour chaque euro investi (la hausse du PIB par euro public dépensé est appelée multiplicateur budgétaire). Ainsi un investissement de 400 Md€ donne une création de richesse de 800 Md€ et une nouvelle recette pour l’État de 240 Md€.

Les éléments de calcul :

  • les dépenses directes, les allocations chômages, le RSA, l’AAH, l’APL, les dépenses indirectes et le manque à gagner en impôts et cotisations, les dépenses de réintégration, les dépenses administratives et les dépenses de santé représentent un coût moyen estimé de 20 000,00 € par chômeur ;
  • la construction et service avec un milliard d’euros investi créeraient environ 12 000 emplois selon l’étude ingénierie et construction ;
  • la formation d’aides-soignants, d’auxiliaires de vie a un coût de 5 400 euros ;
  • le taux d’emprunt de l’État à 10 ans pour les obligations assimilables du trésor approche les 0,050 % ;
  • le taux d’inflation estimé à 1,8 % en 2021 sera limité à 2 %.

L’avantage d’un « livret grand âge » est la création de 1,335 million d’emplois avec une réduction du coût public estimé à 19,5 Md€. Les intérêts de 820 millions d’euros par an (rémunération du livret + taux d’emprunt) versés aux ménages ne créeront aucune inflation étant donné que cette somme sera réintégrée dans leurs revenus et créera de la croissance. La recette nette de l’État sera de 23,18 Md€ par an et sera utilisée pour compenser les manques du budget.

LIRE LA SUITE