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Par Gabriel Gaspard

Publié le 24 novembre 2020 à 13:46

Fin 2019, 11 millions de Français détenaient un plan d’épargne entreprise (PEE) et 3,1 millions un plan d’épargne retraite (Perco, PER entreprise). Si la grande majorité des détenteurs jugent les plans intéressants, en période de crise comme pour la Covid-19, les salariés assistent, impuissants, à l’effondrement de leurs avoirs.

« Le principe de l’épargne salariale consiste à verser à chaque salarié une prime liée à la performance de l’entreprise (intéressement) ou représentant une quote-part de ses bénéfices (participation). Les sommes attribuées peuvent, au choix du salarié, lui être versées directement où être déposées sur un plan d’épargne salariale« . Explication fournie par le site Service public, droits des particuliers. [1] On trouve le plan d’épargne entreprise (PEE), plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), plan d’épargne retraite (PER). Pour le PER trois versions : le PER individuel, le PER d’entreprises collectifs et le PER d’entreprises obligatoire. N’y-a-il pas plus simple ?

Le plan d’épargne entreprise (PEE) est un système collectif d’épargne qui permet aux salariés (et aux dirigeants dans les petites entreprises) d’acquérir des valeurs mobilières avec l’aide de l’entreprise.

Le plan d’épargne retraite (PER) individuel est ouvert à tous. Il succède au Perp et au contrat Madelin. Le PER d’entreprise collectif succède au Perco. Le PER d’entreprise obligatoire succède au contrat au Contrat d’assurance vie collectif souscrit par une entreprise au bénéfice de certains de ses salariés. En bref comment naviguer dans cette forêt avec le transfert d’un ancien plan au nouveau PER ?

S’ils présentent de vrais avantages, ces placements manquent parfois de souplesse et de transparence. Avec un empilement de frais et surtout plus d’un tiers des demandes de médiation de l’AMF (Autorité des marchés financiers) concernent des litiges liés à cette épargne salariale.[2]

Un déblocage très difficile. Lessommes versées sur le PEE sont bloquées 5 ans minimum et pour l’ancien Perco jusqu’à la retraite. Toutefois, des possibilités de déblocages anticipés, qui varient selon le dispositif PEE ou PER d’entreprise collectif, permettent de récupérer les avoirs avant les délais. Pour exemple, l’achat ou l’agrandissement de la maison principale, la rupture du contrat de travail, etc. Le déblocage n’est pas automatique, il faut faire la demande. C’est là où les litiges arrivent car les teneurs de comptes n’acceptent que les pièces justificatives mentionnées dans le guide de l’épargne salariale édité par le ministère du travail. Ce guide précise : « la liste des documents à fournir n’est donnée qu’à titre indicatif« . Tout laisse à supposer que le Guide pour l’élaboration des textes législatifs et réglementaires, élaboré conjointement par des membres du Conseil d’Etat et le Secrétariat général du gouvernement n’est pas suivi. Ce Guide est conçu comme « un ouvrage de référence« . Il poursuit l’objectif de « ne faire que des textes nécessaires, bien conçus, clairement écrits et juridiquement solides« .

Un fléchage non accommodant. Un décret permet l’application effective au 1er janvier 2016 de certaines mesures relatives à l’épargne salariale prévues par la loi du 6 août 2015. C’est le cas par exemple de l’affectation par défaut de l’intéressement à un plan d’épargne salariale PEE. La loi prévoit des processus daffectation automatique de l’épargne salariale si le bénéficiaire ne manifeste pas ses volontés de placements dans les 15 jours. De plus, la loi pacte permet aux entreprises de mettre en place un PER collectif sans proposer de PEE. Dans ce cas, les épargnants ne peuvent plus défiscaliser leur prime d’intéressement à court terme. Ils seront obligés de bloquer leur avoir jusqu’à l’âge de la retraite.

Un empilement de frais et de prélèvements. Frais de tenue de compte, d’entrée, de gestion, d’arbitrage… Comme la grande majorité des placements, l’épargne salariale intègre plusieurs types de frais. Il faut savoir les décrypter. A lire le Particulier de septembre 2020 numéro 1172 on trouve un bon résumé :

  • frais de tenue de compte : 5€/an pris en charge par l’employeur, sinon 30€ si l’épargnant quitte l’entreprise ;
  • frais d’entrée : de 0 à 4% payés par l’épargnant, les frais peuvent être pris en charge par l’employeur si l’épargnant est en poste ;
  • frais de gestion des fonds : 0,1% pour les fonds sécuritaires, jusqu’à 3% pour les fonds actions à payer par l’épargnant ;
  • frais d’arbitrage : à la charge de l’épargnant, sauf accords contraire.

En plus pour l’épargnant, les primes versées sont amputées de la CSG et la CRDS (au taux de 9,7%), avant d’atterrir sur son PEE ou PER.

Heureusement pour les nouveaux PER collectifs, ils ne subiront aucune fiscalité sur le capital accumulé et les plus-values. Et seules les plus-values subiront les prélèvements sociaux de 17,2%.[3]

« S’agissant des performances nettes, les conclusions sont moins claires. Les fonds actions, obligataires et monétaires réservés aux institutionnels semblent néanmoins plus performants que leur équivalent en fonds d’épargne salariale. Ces conclusions sur les performances nettes doivent toutefois être prises avec précaution car elles apparaissent très variables dans le temps. » Conclut l’AMF (Autorité des marchés financiers) dans leur étude « Frais et performance des fonds d’épargne salariale » de décembre 2019. [4]

Une absence de conseil. L’enquête réalisée par OpenWay en février 2020 pour le compte de l’AMF et l’AFG (Association Française de la Gestion Financière) montre que plus de 55% des épargnants réclament des conseils. Il est aussi très curieux que cette épargne salariale échappe à la réglementation européenne. La vente des actions aux salariés échappe à toutes les règles habituelles de vente de produits financiers :

  • Pas de questionnaire d’investisseur proposé au salarié pour vérifier sa connaissance des titres qu’il peut acquérir ;
  • Pas de questionnaire lui proposant de s’interroger sur la pertinence de son éventuel investissement par rapport au reste de son épargne, etc.

Une déshérence de contrats collectifs. Au 31 décembre 2019, l’épargne salariale totalisait 144,2 Md€ d’encours, soit une croissance spectaculaire de 15% sur l’année. La loi Eckert de 2014 impose aux banques et assurances, depuis le 1er janvier 2016, de recenser les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance vie en déshérence afin d’en rappeler systématiquement l’existence à leur titulaire. Malgré cette loi, 13 Md€ d’épargne salariale cherchent encore leurs bénéficiaires.[5]

L’alternative est la création d’un seul livret individuel pour l’épargne salariale entreprise et pour la retraite LSER , en remplacement du PEE et des PER individuel et entreprises.

Le nouveau LSER doit être très simple, à lecture des informations fournies par les sites du gouvernement sur le PEE, PEI, PEG, Perco, PER, etc., selon l’adage bien connu « si vous avez compris quelque chose, c’est qu’on vous l’a mal expliqué » :

  • toute personne majeure peut être titulaire du livret LSER ;
  • pas de plafond maximal ;
  • un seul livret par personne ;
  • le versement sur le LSER doit être au choix de l’épargnant ;
  • pas de condition d’ancienneté ;
  • les sommes versées sont indisponibles jusqu’à la retraite ;
  • un déblocage anticipé dans les cas suivants : mariage, Pacs, naissance ou adoption d’un enfant, divorce, séparation, dissolution d’un Pacs, violence conjugale, invalidité (son époux(se) ou partenaire du pacs ou un des enfants), décès (son époux(se) ou partenaire du pacs ou un des enfants), rupture de contrat de travail, surendettement, création ou reprise d’entreprise (son époux(se) ou partenaire du pacs ou un des enfants), acquisition d’une résidence principale (ou travaux d’agrandissement ou remise en état suite à catastrophe naturelle), expiration des droits d’un salarié à l’assurance chômage, cessation d’une activité non salariale ;
  • pas de limite en temps pour la demande de déblocage ;
  • le LSER sera alimenté par les sommes issues de l’intéressement de l’entreprise, de la participation de l’entreprise, sommes issues d’autres plans d’épargne salariale, et des versements volontaires ;
  • le livret doit être sans frais et les intérêts versés exonérés d’impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux ;
  • les capitaux versés sur le livret doivent être garantis pat l’Etat à hauteur de 100 000€ ;
  • une rémunération minimale garantie par l’État jusqu’à 100 000€, égale à l’inflation versée par prime à la fin de chaque année ;
  • tous les établissements bancaires pourront proposer ces comptes. La rémunération de gestion pour les banques ne doit pas dépasser 0,20% ;
  • les fonds doivent être gérés par un établissement de crédit public. 90% des fonds doivent être transférés à cet établissement de crédit. Le conseil d’administration doit être obligatoirement paritaire ;
  • les sommes accumulées jusqu’au jour de départ en retraite seront reversées sous la forme d’une rente jusqu’au décès, la rente peut être réversible au conjoint ;
  • après le départ à la retraite, la rente ne sera pas soumise à l’impôt sur le revenu.

Les fonds collectés doivent être placés à moitié dans la finance 100% verte, sociale et responsable. L‘autre moitié dans des fonds pour la retraite, la dépendance et le handicap.

Les idées d’investissements pour la retraite, la dépendance et le handicap doivent permettre d’accompagner :

  • la création d’habitats à but non lucratif partagés, sécurisés avec accompagnement, un habitat entre les résidences et les EHPAD, un habitat intégrant des micro-crèches et des services de soins Infirmiers ;
  • la création des maisons de répits médicalisés à but non lucratif ;
  • la création d’ EHPAD spécialisés à but non lucratif ;
  • la création d’établissements spécialisés à but non lucratif avec embauches d’accompagnants ;
  • la création d’un réseau social pour les handicapés ;
  • la création de maison de retraite sociale ;
  • la création de centres de musicothérapie ;
  • la création de centres de vacances pour les déficients visuels ou auditifs ;
  • la création de structures de visite de malades en fin de vie ;
  • etc.

Une fois à la retraite, les séniors souhaitent profiter d’un mode de vie plus calme et plus serein, sans soucis d’argents, sans crises de la nature (climat, épidémies).


[1] https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/N517

[2] http://leparticulier.lefigaro.fr/article/l-epargne-salariale-reste-tres-verrouillee/

[3] https://www.lerevenu.com/placements/epargne-salariale/epargne-salariale-tout-comprendre-en-15-points%5B3%5D

[4] https://www.afg.asso.fr/wp-content/uploads/2019/12/2019-10-amf-frais-et-performance-fcpe.pdf

[5] https://www.gouvernement.fr/argumentaire/loi-sur-les-comptes-bancaires-inactifs-comment-ca-marche

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