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Par Gabriel Gaspard

Publié le 03 octobre 2023 00:00

On vit en Europe dans un système économique libéral. Une grande partie de l’économie est libéralisée et dominée par des grands groupes internationaux. Dans les prochaines années les Bourses émergentes devraient profiter d’une meilleure croissance que les Bourses européennes : les multinationales vont-elles quitter l’Europe ?

Un système économique libéral est un système dans lequel les agents économiques ont la liberté de vendre et d’acheter des biens, des services et des capitaux. C’est une économie de marché qui s’oppose à une économie planifiée dans laquelle toutes les grandes décisions sont prises par l’État. Mais dans l’Union européenne, cette économie de marché se combine avec des contraintes et des restrictions imposées par certains États et par l’Europe pour un meilleur fonctionnement du marché. Elle n’est pas incompatible avec l’existence de programmes sociaux pour compenser les effets négatifs, notamment sur ceux qui n’arrivent pas à s’insérer dans ce système. Elle n’est pas incompatible avec la liberté des entités publiques de détenir des participations, même majoritaires, dans des entreprises privées. L’article 345 TFUE exprime la neutralité de l’Union à l’égard des régimes de la propriété existants dans les États membres. Toutefois, les interventions des États ne doivent pas favoriser certaines entreprises au détriment d’autres, et les aides aux entreprises et aux citoyens ne doivent pas dépasser certaines limites.

Une grande partie de l’économie est libéralisée et dominée par des entreprises internationales. Les données représentatives sur les activités des grands groupes internationaux sont encore rares en Europe car les statistiques nationales ne distinguent que de manière limitée les entreprises nationales et multinationales. Pour les dernières données publiées par Eurostat : en 2021, 155 983 groupes d’entreprises multinationaux opéraient dans l’UE (Union Européenne) et AELE (L’Association européenne de libre-échange), employant plus de 45 millions de personnes selon le registre statistique européen des groupes d’entreprises multinationaux (EuroGroups Register). Environ une personne sur cinq, employée en Europe travaille pour un groupe d’entreprises multinational. Les trois pays en dehors de l’UE et de l’AELE qui contrôlaient les groupes d’entreprises les plus multinationaux de l’UE et de l’AELE sont le Royaume-Uni (plus de 11 700 groupes d’entreprises multinationaux), les États-Unis (environ 7 900 groupes d’entreprises multinationaux) et la Chine, dont Hong Kong (environ 2 700 groupes d’entreprises multinationaux). Les plus grandes contributions fiscales des plus grandes multinationales sont au Luxembourg puis en l’Irlande. En revanche, elles participent plus dans les économies de l’Europe centrale et orientale comme la République tchèque, Hongrie, Slovaquie, Roumanie, etc. (source OCDE 2021).

En Europe les régimes fiscaux appliqués sont des régimes territoriaux. En principe les bénéfices des entreprises multinationales devraient être imposés dans les pays de production. En pratique ces entreprises peuvent délocaliser leurs activités vers des pays à faible fiscalité pour réduire l’impôt ou organiser des transferts inter-groupe. Il est très difficile de déterminer où la création de valeur a eu lieu. Les entreprises multinationales déclarent la majorité de leurs bénéfices dans des paradis fiscaux.

Les grandes entreprises multinationales ont battu un nouveau record en 2022. Elles ont versé à leurs actionnaires 1 560 milliards de dollar, selon un rapport du gestionnaire d’actifs Janus Henderson qui recense les 1 200 plus grosses capitalisations boursières. Les versements d’entreprises européennes représentent environ un quart des dividendes mondiales soit 390 milliards de dollar. La France vient en seconde position avec 63,2 milliards de dollar. Cette distribution mondiale de dividende correspond à 58,65% du PIB annuel de tous les pays africains (PIB africain : 2 660 milliards de dollar).

Comment la dette publique augmente la richesse des entreprises multinationales ? Avec toutes les crises : bulles internet en 2000, crise de subprimes en 2007-2008 et la crise de 2020 déclenchée par une pandémie mondiale, les pays européens, par leurs endettements extérieurs, ont injecté beaucoup d’argent dans les marchés. L’augmentation des Bourses est tout simplement l’évolution de la quantité d’argent et du volume de dépenses dans l’économie. L’indice boursier suit en réalité l’évolution de la masse monétaire. Plus les pays européens empruntent sur les marchés financiers via des banques privées plus il y a création de monnaies. Plus il y a d’argent circulant dans l’économie plus il y a d’argent disponible pour investir dans des actions. Ce corolaire rend également les instruments d’investissement alternatifs, tels que les obligations, moins attractifs. Ce qui profite uniquement aux plus grosses capitalisations boursières : la croissance moyenne de la zone euro a été de 1,34% par an de 2000 à 2022 (données Banque mondiale). Concernant Euronext 100 (cet indice représente les 100 plus fortes capitalisations boursières d’Euronext) cette croissance était de 5,68% en moyenne par an de 2003 à fin 2022 (données Abcbource).

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