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Par Gabriel Gaspard

Publié le 18 juin 2024, 0:00

La poussée des partis non démocratiques aux dernières élections européennes pose le problème des inégalités de revenus qui encouragent les électeurs à transférer leur soutien aux parties nationaux-populistes ou d’extrêmes-droites. La réponse ne devrait-elle pas être l’évolution du marché immobilier et son contexte macroéconomique ?

La poussée des parties non démocratiques. Pour la première fois, la poussée des parties extrémistes, les partis nationalistes ou les partis populistes de gauche ou de droite, etc. s’observe dans une large majorité de pays européens. Cette droitisation du Parlement européen pose une question d’inégalités de revenus pour les démocraties libérales. L’inégalité des revenus entraîne des risques économiques et des insécurités. La hausse des niveaux d’inégalité fausse le crédit dans les représentants des partis traditionnel et diminue la confiance dans les élites politiques.

Aborder cette inégalité par le biais de la macroéconomique permet de comprendre la répartition du revenu dans la population. Le logement est devenu un indicateur majeur de la pauvreté des conditions de vie. Ne faut-il pas répondre aux aléas économiques et aux inquiétudes par une augmentation des revenus en créant des logements abordables ?

Immobiliers les prix explosent, les niveaux de vie baissent. Entre 2010 et T2 2022, les loyers européens ont augmenté de 18% et les prix des logements de 48%. Selon l’Eurobaromètre, six mois avant les élections européennes de 2024, près des trois quarts des citoyens de l’Union pensent que leur niveau de vie va baisser au cours de l’année à venir, tandis que plus d’un tiers d’entre eux éprouvent des difficultés à payer leurs factures. Dans une lettre ouverte, les villes européennes soulignaient : « de plus en plus d’Européens ressentent les effets de la crise du logement qui touche une grande partie du bloc » et plaident « en faveur d’investissements dans le logement abordable, de réformes législatives et d’une approche plus large du logement social« . En France le secteur du logement social connait une crise profonde, la Fondation Abbé Pierre estimait que 3,8 millions de personnes souffraient de mal-logement.

Le principal thème commun des partis autoritaires n’est pas uniquement l’immigration et le changement culturel, la crise du coût de la vie a été une question décisive pour les élections européennes dans plusieurs pays. Cette crise affecte la santé et le bien-être des personnes ; elle augmente les coûts des soins de santé ; elle réduit la productivité ; elle crée des dommages à l’environnement.

Pour la France, les impôts et prestations sociales réduisent les inégalités de niveau de vie entre les plus riches et les plus pauvres, mais cette redistribution est-elle toujours efficace ? D’après l’Insee, cette répartition profite majoritairement aux ménages les plus modestes et aux plus de 65 ans. Pour les libéraux européens, la redistribution n’est pas nécessaire, elle est même inefficace. Redistribuer des revenus pour mieux se loger, etc. cela désinciterait la classe modeste à fournir des efforts pour s’en sortir mieux.

Réduire les impôts, Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), a estimé que le gouvernement « n’avait pas les moyens« . Augmenter massivement les salaires, les employeurs sont réticents faute de maîtrise de leurs financements. Reste à agir sur les 32% des revenus consacrés au logement par les ménages les plus modestes. Il faut ramener ce pourcentage de 32% à 19,7% (moyenne) contre 14,1 % pour les ménages les plus aisés.

La responsabilité de l’Europe et de la France dans la crise du logement.

Le Traité de Lisbonne. Adopté en 2007, ce traité encadre actuellement le fonctionnement de l’UE. « Il a été engagé à la suite du résultat négatif de deux référendums sur le traité constitutionnel tenus en mai et juin 2005« . Le but de ce traité était de favoriser la croissance et l’emploi tout en maintenant la compétitivité de l’économie européenne. Ce traité n’a pas créé le renouveau voulu des modèles capitalistes européens. Il a cherché à réformer un modèle néolibéral par un mouvement de réformes structurelles (santé, retraite, chômage, etc.). « Ces réformes n’ont pas permis pour autant de combler l’écart de PIB par habitant avec les pays les plus performants« . La classe moyenne continue à disparaître à cause des réformes structurelles.

La BCE a aggravé la crise du logement. Une autre partie de l’explication est à chercher du côté de la Banque centrale européenne BCE. Il faut rappeler que les taux directeurs de la BCE se répercutent sur les taux de prêt immobilier et le taux de refinancement des banques.

  • La BCE aurait dû augmenter comme la Banque centrale américaine FED ses taux à partir de mars 2022 et non en juillet 2022 pour éviter aux pays européens de budgétiser l’inflation par des aides et créer des déficits colossaux. Le taux d’inflation annuel en zone euro était déjà à 8,9% en juillet 2022.
  • Alors que l’inflation commençait à grimper à 0,9% en janvier 2021 (0,3% en décembre 2020), la BCE décide d’étendre ses orientations prospectives sur les achats nets APP au-delà d’octobre 2022. L’APP ou Asset Purchase Programme a pour but officiel de stimuler l’inflation.
  • Alors qu’il fallait lutter contre l’inflation, la BCE a accordé des taux négatifs aux banques jusqu’au 23 juin 2022. Ce meilleur taux négatif représente une énorme subvention aux banques et un excès de liquidité, donc d’inflation, alors que les banques au même moment augmentaient les taux des prêts immobiliers aux ménages à partir de février 2022.

Et la France vote des lois improductives et des multitudes de règles. Les lois à partir de juillet 2022 :

  • La LOI n° 2022-217 du 21 février 2022 dite loi 3DS. Elle consacre la différenciation territoriale ; elle conforte les compétences des collectivités ; elle renforce les services territoriaux ; elle simplifie l’action publique.
  • Le « bouclier loyer » décide du plafonnement des augmentations de loyer à 3,5% et révise les APL, ALF et ALS (aides personnalisées au logement) de 3,5% avec une application rétroactive au 1erjuillet 2022, dans le cadre de la loi de finances rectificative, du 16 août 2022.
  • Enfin il y a le projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables sera devant l’assemblée en septembre 2024 (quelle assemblée ?) et prévoit l’intégration des logements intermédiaires dans la loi SRU avec durcissement des surloyers en HLM, nouveaux pouvoirs conférés aux maires dans l’attribution des logements sociaux…

Immobilier où va la France ?

Le « choc d’offre«  du premier ministre le 3 mai 2024, sonne comme un échec face aux chiffres inédits que traverse la crise du logement en France depuis 2022 : 2,6 millions de demandes de logements sociaux et un besoin de 900 000 logements abordables …

Enfin, en 2018, l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) remplace l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et le prélèvement forfaitaire unique (PFU) se substitue à la taxation des revenus du capital au barème de l’impôt sur le revenu. Il a freiné la rentabilité de l’immobilier à long terme par rapport aux placements en actions.

Accès aux investissements dans l’immobilier et les actions. La principale différence entre l’investissement dans l’immobilier et les actions est que l’investissement dans l’immobilier consiste à acheter des biens et à les louer ou les habiter. Tandis que l’investissement dans des actions implique d’acheter une petite tranche d’une entreprise et d’attendre que ces actions augmentent en valeur pour les vendre. D’après l’édition 2024 de l’IEIF (Institut de l’épargne immobilière et foncière), sur 30 ans (2003-2023) le logement et les Foncières devancent les actions. Sur 15 ans (2008-2023) les actions ont eu un taux de rendement interne (TRI) de 9,9% alors que le TRI pour le logement France a rapporté 5,2%.

Quant à l’acquisition d’un logement principal, les plus modestes deviennent de moins en moins propriétaires et les plus pauvres ont de plus en plus de difficultés à l’accès au parc social.

« Quand le bâtiment va tout va ».

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